Ivan Aïvazovski (1817-1900)
La baie de Naples, 1877
Ivan Aïvazovski (1817-1900)
La baie de Naples, 1877
Huile sur toile. Signé et daté en bas à droite.
Exposition La poésie de la mer, 2007, Musée de la Marine (Paris).
Ivan Constantinovitch Aïvazovski est né à Théodosie (Féodosia, Ukraine) en Crimée en 1817, sur la rive nord de la Mer Noire de laquelle il tirera sa fascination pour l’élément liquide, mais qu’il ne peindra jamais d’après nature. Son père, Guévork (Constantin) et sa mère Hripsimée, commerçants venu de Moldavie, associèrent, pour des raisons pratiques la terminaison « ovski » au nom de famille Aïvazian, qui comptait alors trois garcons et deux filles. Il était doué pour le violon et le dessin dès son plus jeune âge. Après son instruction élémentaire à l’école de la ville, le maire A. Kaznatchéev, l’aidera à s'inscrire au lycée de Simféropol, la grande cité 150 km à l’ouest, au centre de la péninsule de Crimée. Il fera ensuite son apprentissage artistique à l’Académie des Beaux-Arts de Saint-Pétersbourg.
À la fin de ses études en 1837, il reçoit la Médaille d’Or de l’Académie ainsi qu’une bourse pour se perfectionner à l’étranger. Mais auparavant il est chargé par l’Académie de peindre les villes du littoral de Crimée. En 1840 il part enfin pour l'Italie. Sources d'inspirations, Naples, Rome, Florence et Venise le verront tour à tour poser son chevalet, créant plus de cinquante tableaux de grandes dimensions. Ses œuvres font sensation, il est reçu par le Pape Grégoire XVI. Il sillonnera l’Europe pendant quatre ans et en reviendra membre des Académies de Rome, Paris et Amsterdam.
Il a 27 ans à son retour lorsqu’il est nommé en 1844, peintre officiel de la Marine Russe. Il s’acquittera consciencieusement de cette charge en créant une série de tableaux glorifiant les victoires. En tant que peintre de marine, c’est un peintre de fiction. Son art est avant tout onirique, il montre une perception poétique de la nature. Toujours travaillée en atelier, sa technique aboutie à l'extrême laisse libre cours à son imagination. Ses transparences plongent le ciel et la mer vers des mondes insondables. Avec une habileté stupéfiante il offre à la lumière cette fluidité diaphane qui fascinera William Turner, l’inspirateur des Impressionnistes.
En 1845, revenant dans sa ville natale de Théodosie, il construit sa maison-atelier, qui deviendra son musée. La même année il se rend pour la première fois à Istanbul où il rencontre le Patriarche Matteos II. Mais ce relatif isolement l'éloignera du courant artistique du « réalisme démocratique » émergeant dans les arts plastiques russes vers la seconde moitié du XIXe siècle. Il retournera néanmoins à Istanbul à plusieurs reprises, en 1857, 1858 et 1874. Il est toujours à Théodosie au moment où éclate la guerre de Crimée qui durera de 1853 à 1856. Pendant cette période il organise une exposition de ses tableaux dans la ville assiégée de Sébastopol.
Exaltant la résistance russe, ses toiles connurent une telle notoriété que même ses ennemis lui rendirent hommage. À l’instar de Napoléon III qui le fait Chevalier de la Légion d’Honneur en 1857, cette même année où il présente à Paris, son exposition personnelle. Paris qu’il affectionne, le verra revenir à trois reprises en 1879, 1887 et 1890. Il fera la connaissance, entre autres, d’Eugène Delacroix (1798-1863) de Gustave Doré (1832-1883) et de Sarah Bernhard (1844-1923). Il ira plusieurs fois sur l'ile de Saint Lazare en face de Venise, rendre visite à son frère Gabriel Ayvazian qui fait partie la Congrégation des Mekhitaristes. Il manipulait aussi bien l'arménien que le russe et signera aussi plusieurs œuvres sous le nom de « Hovhannès Aïvazian ».
En 1868 il parcourt le Caucase, très attaché à ses origines. En 1869 il expose à Tiflis, aujourd'hui Tbilissi, la capitale de la Géorgie. C’était la première fois qu’une exposition de peinture avait lieu dans une ville de province de l’Empire russe. Il tenta par tous les moyens d'alerter l'opinion mondiale contre les atrocités dont ses compatriotes furent victimes dans les années 1890 dans l'Empire Ottoman et peignit notamment le « Massacre des Arméniens à Trébizonde en 1895 ».
Ses toiles furent exposées à Moscou en 1898 au profit des victimes. Il participa à beaucoup d’autres actions humanitaires, en particulier la lutte contre les famines qui sévissaient dans certaines régions de Russie à la fin du XIXe siècle. Il distribua sa fortune personnelle à ses concitoyens de Théodosie, où il décède en 1900. Sur sa pierre tombale dans l'église arménienne de Saint-Serge, est gravé en arménien : « Il est mortel, il a laissé une mémoire immortelle ».
Frédéric Fringhian